Le 06/04/2025
La Corée du Nord, officiellement connue sous le nom de République Populaire Démocratique de Corée (RPDC) et désignée dans le monde de la radioamateur par le préfixe P5, est l’une des entités DXCC les plus rares et les plus convoitées par les radioamateurs du monde entier.
Son statut de « Saint Graal » de la radioamateur n’est pas seulement dû à sa situation géographique dans le nord-est de l’Asie, mais aussi aux restrictions gouvernementales strictes qui interdisent à ses citoyens de posséder du matériel de radioamateur et limitent sévèrement les opérations étrangères.
Cet article explore l’histoire, les défis et les rares moments où le P5 a été actif dans l’éther.
Contexte historique et rareté
La Corée du Nord ne délivre pas de licences de radioamateur à ses citoyens, une politique qui reflète son contrôle strict sur les communications.
Le préfixe P5 a été attribué par l’Union internationale des télécommunications (UIT) au pays, mais son utilisation a été extrêmement limitée. Depuis que la RPDC a été acceptée comme
entité DXCC par l’ARRL en 1995, avec des contacts valides à partir du 14 mai de cette année, seulement une poignée d’opérations ont été accréditées. Cette rareté a positionné P5 comme
l’entité la plus recherchée au niveau mondial, selon des classements comme celui de ClubLog.
L’isolement politique et le manque d’infrastructure pour
la radioamateurisme ont fait que les activations de P5 dépendent exclusivement des visiteurs étrangers, qui doivent traverser un processus bureaucratique complexe et opérer sous une
surveillance stricte du gouvernement nord-coréen, presque toujours sans résultats.
Opérations Historiques
Les opérations radio depuis la Corée du Nord ont été sporadiques et, dans de nombreux cas, brèves. Voici quelques événements clés :
- 1995 – P5/OH2AM: Le 14 mai 1995, Martti Laine (OH2BH) et d’autres radioamateurs finlandais ont réalisé une démonstration de radioamateurisme à Pyongyang, effectuant 20 contacts sous le call sign P5/OH2AM. Il s’agissait de la première opération accréditée depuis le pays.
- 1999 – P51BH: Martti est revenu en avril 1999, opérant sous le call sign P51BH et réalisant 263 contacts. Bien que limitée, cette activité a renforcé la présence de P5 dans le DXCC.
- 2001-2002 – P5/4L4FN: L’opération la plus significative à ce jour a été celle d’Ed Giorgadze (4L4FN), un radioamateur géorgien. Avec l’autorisation orale des autorités nord-coréennes, Giorgadze a opéré depuis Pyongyang entre 2001 et 2002, accumulant plus de 16 000 contacts en SSB et RTTY. Son activité a été créditée pour le DXCC, mais elle a pris fin brusquement le 22 novembre 2002, lorsque le « Conseil de régulation des radios » lui a ordonné d’arrêter ses transmissions et de démonter son équipement. Cette opération reste une référence pour la communauté.
- 2015 – P5/3Z9DX: Le Polonais Dom Grzyb (3Z9DX) a réalisé une démonstration surprise les 20 et 21 décembre 2015, opérant depuis Pyongyang avec une antenne verticale et 100 watts sur les bandes 20, 15 et 10 mètres SSB. Il a réussi 785 contacts avec 31 pays, malgré des conditions de propagation défavorables et un niveau de bruit élevé dans la ville. Cette activité faisait partie d’un plan plus large pour une opération en 2016, qui a finalement été reportée et ne s’est pas concrétisée comme prévu.
✔ Actuellement, la Corée du Nord
occupe la position n°1
des pays DXCC les plus recherchés
selon le classement de ClubLog ✔
Défis pour les Opérations
Activer P5 est un défi monumental pour plusieurs raisons :
Restrictions Gouvernementales : Le gouvernement nord-coréen considère les communications non autorisées comme une menace pour la sécurité nationale. Toute opération nécessite des autorisations explicites, une surveillance constante et, souvent, la remise du matériel une fois l’opération terminée.
Logistique : Atteindre la Corée du Nord implique des démarches de visa complexes et des voyages coordonnés, généralement via la Chine. Transporter des équipements radio ajoute une couche supplémentaire de difficulté en raison des régulations douanières.
Conditions Opérationnelles : Les opérations se déroulent souvent dans des environnements urbains bruyants, comme Pyongyang, avec des antennes improvisées (par exemple, une verticale sur une clôture métallique dans le cas de P5/3Z9DX).
Manque de Soutien Local : Sans une communauté d’amateurs de radio locale, les opérateurs dépendent exclusivement de leurs propres ressources et de leur expérience.
Tentatives Frustrées et Efforts Récents
Plusieurs groupes ont tenté d’activer P5 sans succès. Le groupe The Intrepid DX, dirigé par Paul Ewing (N6PSE) et David Flack (AH6HY), a annoncé en 2013 le « Projet P5 », investissant des années et des ressources dans des négociations avec le Ministère des Affaires Étrangères et le Ministère des Télécommunications nord-coréens. Malgré l’obtention d’une lettre d’invitation, le projet a échoué en 2015 en raison du manque de soutien financier des fondations DX et de problèmes de visas.
Une autre tentative notable a été celle d’Antonio González (EA5RM) et Manuel German (EA7AJR), qui, entre 2013 et 2015, ont tenu des réunions avec des
responsables nord-coréens. En août 2015, après une rencontre avec le Ministère des Télécommunications à Pyongyang, ils ont rapporté être « très proches » d’obtenir une autorisation, mais
il n’y a aucune trace de cette opération concrétisée.
L’Avenir de P5
Jusqu’en avril 2025, il n’y a pas eu d’opérations significatives en P5 depuis 2015. La combinaison de restrictions politiques, du manque d’intérêt gouvernemental et de la difficulté à coordonner les expéditions a maintenu la Corée du Nord en tête de la liste des « plus recherchés ». Cependant, chaque opération passée a prouvé qu’avec persévérance et diplomatie, il pourrait être possible de rompre le silence de l’éther nord-coréen, ne serait-ce que brièvement.
Pour les radioamateurs, P5 représente plus qu’un contact rare ; c’est un symbole des limites de la connectivité humaine dans un monde divisé. Si les portes de la Corée du Nord demeuraient au moins entrouvertes, l’espoir d’entendre « P5 » sur les bandes serait une réalité.
Rien de tout cela au cours de ces années ne montre une possibilité minimale d’une opération proche depuis P5, bien que l’espoir soit la dernière chose que l’on perde.